Suzanne-G. CHARTRAND (dir.), Mieux enseigner la grammaire. Pistes didactiques et activités pour la classe, Montréal, Pearson - EPSI Éducation, 2016 (346 p., 36 euros).
Comme l’annonce S.-G. Chartrand dans son introduction, cet ouvrage entend « donner un second souffle à la rénovation de l’enseignement grammatical », car si cette rénovation fut largement avancée dans la plupart des pays francophones, au tournant des années 1960 et 1970, il reste encore un effort considérable à fournir pour parvenir à «ouvrir la grammaire», comme l’entendait Éric Genevay, auquel il est rendu hommage dans les premières pages du livre. Cette seconde rénovation proposée ici est l’aboutissement de plusieurs années de réflexion et de rédaction qui réunit une soixantaine d’auteurs, didacticiens du français, enseignants et formateurs de Belgique, de France, du Québec, d’Ontario francophone et de Suisse romande. L’objectif de ce collectif est clairement d’améliorer les contenus et modalités de cet enseignement grammatical, afin d’aider les élèves — et leurs enseignants — à mieux comprendre les fonctionnements, les régularités, les structures qui s’organisent en système ; un système dont ils ont souvent du mal à percevoir les propriétés et les finalités dans un ensemble et une logique pourtant accessibles.
Plutôt que de proposer une énième analyse critique, Mieux enseigner la grammaire suggère des pistes d’interventions didactiques, des dispositifs éprouvés dans des classes, des activités qui combinent une maitrise assurée des savoirs grammaticaux et des mises en œuvre précises, testées auprès de classes d’élèves âgés de 8 à 15 ans ; ce qui correspond aux cycles primaire et collégial de la plupart des pays cités. Bien évidemment, les auteurs ont intégré les difficultés d’une telle entreprise, notamment sur les risques liés à des terminologies hétérogènes d’un pays ou d’une province à l’autre, au statut du français comme langue première et/ou seconde, comme langue d’usage généralisé ou plus strictement de scolarisation ; mais aussi aux histoires respectives de cet enseignement qui expliquent beaucoup des résistances, des confusions, des errements encore présents dans les programmes ou les manuels d’apprentissage de chacune de ces régions francophones.
L’ouvrage est organisé en deux grandes parties. La première comprend cinq chapitres qui rappellent les fondements et posent l’histoire de cette grammaire rénovée (J.-P. Bronckart), mais aussi son sens et sa pertinence (S.-G. Chartrand, M.-A. Lord, F. Lépine), ses contenus et ses démarches (E. Bulea-Bronckart, M.-L. Elalouf), le rôle et les enjeux de la métalangue et du travail métalinguistique (M.-A. Lord, M.-L. Elalouf), la question épineuse de la progression des notions grammaticale (S.-G. Chartrand, D. Cogis, M.-L. Elalouf) pour en proposer des enseignements précis.
La seconde partie, plus développée, comprend neuf chapitres. Elle présente les contenus ciblés de différents dispositifs d’enseignement de la grammaire, notamment sur l’approche syntaxique de l’écrit avec des élèves en difficultés (C. Péret, R. Gagnon), l’orthographe grammaticale (D. Cogis, C. Brissaud, C. Fisher, M. Nadeau), cette notion-clé qu’est le verbe (P. Gourdet, D. Cogis, M.-N. Roubaud), le système de la conjugaison (S. Roy-Mercier, S.-G. Chartrand), la phrase subordonnée relative (S.-G. Chartrand, R. Gagnon), la ponctuation et le cas de la virgule (V. Paolacci, D. Bain, M.- P. Dufour), les procédés de reprise des informations (M.-C. Paret, S. Richard), les diverses formes et valeurs du discours rapporté (F. Grossmann, L. Rosier), la révision-correction de textes comme temps fort de l’activité grammaticale (J. Lecavalier, S.-G. Chartrand, F. Lépine). L’ouvrage se clôt sur un regard positif de l’enseignement de la grammaire (D. Colin), et les très utiles annexes : glossaire de la terminologie utilisée, correspondance des âges et degrés scolaires des quatre pays francophones et références bibliographiques choisies, permettant de prolonger ou de préciser l’ensemble.
Inutile de dire combien cette somme constitue aujourd’hui un incontournable pour tout enseignant, ou futur enseignant, formateur ou chercheur qui y trouvera une argumentation étayée pour cet apprentissage directement lié à celui de la production écrite, et une diversité d’approches des notions grammaticales à enseigner, associées à des indications méthodologiques ajustées.
Jacques DAVID