Prévention et intervention : Comment agir efficacement face au décrochage scolaire ?
Conférence de comparaisons internationales
CNESCO 9-10 novembre 2017 – CIEP
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Nathalie Mons ouvre la conférence en soulignant que, si la thématique du décrochage scolaire a fait de nets progrès dans l’institution française et dans les politiques publiques depuis une quinzaine d’années grâce à une politique européenne, trop de jeunes sortent encore du système non diplômés dans un pays qui accorde au diplôme une place nettement plus grande qu’à l’étranger, où les acquis de l’expérience professionnelle sont mieux reconnus. C’est le but de ces comparaisons internationales, pratiquer une sociologie du détour, aller voyager à l’étranger, se servir de ce qui a fonctionné ou échoué pour analyser la situation française.
Avant les interventions, la parole est donnée aux élèves qu’on écoute peu sur ce sujet. Leurs témoignages, dans le film « Paroles de décrocheurs », montrent la grande complexité du phénomène.
Pierre-Yves Bernard. Le décrochage scolaire, la construction d’un problème public en France et à l’étranger.
De quoi parle-t-on ? Comment s’est construit le problème public du décrochage ? Succédant à d’autres termes (déscolarisation, sortants précoces, ruptures scolaires), la notion de « décrochage scolaire » est définie par le code de l’éducation comme une situation (art L. 313-7), dont la norme est fixée par voie règlementaire. Cette définition présente un avantage, elle permet de produire des mesures statistiques, de faire des comparaisons dans le temps et dans l’espace ; et un inconvénient, elle occulte ce qui se passe avant le décrochage, le parcours, l’expérience antérieure de l’élève dans lesquels il faut aller chercher.
Pourquoi s’en préoccuper ? Même si la question peut sembler provocatrice, le « problème » pointe deux paradoxes :
1. on est passé d’une problématique marché du travail à une problématique scolaire : en effet, le fait que des jeunes sortent sans diplôme n’est pas un problème nouveau (qualifié autrement auparavant).
2. on assiste à une dramatisation très récente du problème « scolaire ».
Pour expliquer ces deux paradoxes, il faut revenir sur la genèse de l’expression qui a désigné progressivement un problème scolaire. La notion, née aux États-Unis, est devenue centrale dans les années soixante avec une production de statistiques. Elle connait une traduction québécoise dans les années quatre-vingt-dix. En Europe il faut attendre le sommet de Lisbonne en 2000 qui fixe Éducation 2020. La question de l’insertion professionnelle des jeunes sortant sans diplôme s’aggrave dans le temps, avec une résistance du système français, où l’expression arrive par les périphéries du système, le monde associatif. Il faut attendre 2008 pour que l’expression soit officialisée, et déclinée en une série d’actions.
Que sait-on sur le décrochage scolaire ? Dans la recherche américaine, qui a accumulé beaucoup de résultats, a été dominante l’approche par les facteurs de risques : genre, milieu social, capital culturel, premiers acquis scolaires. Les recherches récentes tendent à l’appréhender comme un processus : l’approche par les parcours s’appuie sur une construction du ressentiment scolaire qui s’ancre dans des difficultés précoces d’apprentissage, le désengagement scolaire, l’absentéisme. L’approche par les contextes s’appuie sur les territoires et établissements.
Quels sont les enjeux, et le but de la conférence ? Comment amener tous les jeunes à une qualification reconnue ? Deux axes organiseront la conférence et les ateliers : agir avant la rupture – agir après pour faire accéder autrement à la qualification. Avec la scolarisation du problème, il est important de réinterpréter les accès alternatifs à la qualification.