La main à la pâte : retrouvailles actives avec Liège
En juillet 2015, venu assister en spectateur au Forum de la francophonie, j’avais découvert la cité ardente. Accueillante et atypique - on y célèbre le 14 juillet bien davantage que la fête nationale belge ! -, cette ville m’avait séduit.
C’est donc avec bonheur que j’attendais ces retrouvailles permises par le quatorzième congrès de la Fédération internationale des professeurs de français. En effet, créateur dans mon collège de Seine-Saint-Denis d’un dispositif expérimental, j’avais proposé d’en rendre compte dans un symposium intitulé « Le français pour les jeunes, le français par les jeunes ».
Alors que je préparais cette communication, la première pour moi dans un colloque international, la FIPF fit savoir qu’elle organiserait, pendant le congrès, une « formation certificative » ouverte aux jeunes membres des associations de professeurs de français. L’enjeu : stimuler leur engagement en les sensibilisant aux enjeux de telles associations, et les familiariser avec des outils et des pratiques propres à renforcer leur action. Adhérent de l’AFEF depuis 2015 mais encore peu actif - ma contribution se limitait à deux articles publiés dans les dossiers Ambitieux en français -, familier de l’engagement associatif mais dans un tout autre domaine, j’ai saisi l’occasion d’explorer cette région du monde associatif...
Une stimulante initiation : à la rencontre d’associatifs du monde entier
La formation proposée réunissait une vingtaine d’enseignants venus de différents continents. Pendant une semaine, l’Algérie, le Maroc, le Sénégal se sont ainsi trouvés voisins du Japon, de l’Indonésie et de la Malaisie ; l’Espagne, la Grèce et la France, du Honduras ou du Pérou.
Munie d’une feuille de route précise, cette caravane cosmopolite a sillonné le congrès. De la conférence inaugurale « Mensonge(s) et vérité(s), splendeur et misère du français » prononcée par le poète Pierre Mertens, à la présentation du Livre blanc de la FIPF par Jean-Pierre Cuq, président sortant de la FIPF, en passant par la piquante interrogation « L’Europe déteste-t-elle le français ?». Des ateliers faisant découvrir les ressources en ligne du site francparler-oif.org ou de la plateforme de la FIPF, à ceux explorant les usages possibles des nouvelles technologies en matière d’enseignement du français.
À tous les participants, cette pérégrination offrait un ample panorama des ressources et des enjeux actuels de l’enseignement du français, traversé notamment par la question des chances et des défis indissociables de sa vocation à être une « langue de la modernité ».
À chacun, elle permettait de suivre ou de découvrir un fil rouge autour duquel tisser sa réflexion. Une démarche plus personnelle qui a trouvé à s’exprimer sous deux formes. D’une part, la rédaction d’un compte-rendu à partir d’une des présentations entendues, conduisant à réfléchir aux aspects transposables dans la vie associative. J’ai ainsi travaillé sur les moyens mis en œuvre depuis mars 2016 par l’Organisation internationale de la francophonie dans le cadre de sa campagne « Libres ensemble » de manière à favoriser l’adhésion des jeunes, pour développer le gout de la rencontre et du métissage. D’autre part des témoignages oraux, livrés au micro depuis le stand de la FIPF et, pour quelques-uns d’entre nous, en tête à tête avec une journaliste de la presse française.
Plongée dans une « langue-monde » : à la redécouverte du français !
La première vertu d’un tel parcours, c’est évidemment de nourrir la réflexion pédagogique de ses participants. Paradoxalement, professeur de français langue première venu d’un pays tout proche, j’ai d’abord éprouvé un vrai dépaysement... à me retrouver au milieu d’une foule de collègues enseignant le français comme langue seconde ou étrangère. Des notions, telles le « français sur objectif spécifique » ou l’« interculturalité », des aspects de la francophonie, tels l’action de l’Institut français ou de l’Alliance française, m’étaient beaucoup moins familiers qu’aux autres participants !
Cette situation particulière avait elle-même une vertu : celle de me faire envisager la langue française et son enseignement sous un angle nouveau. Ainsi,au-delà des prises de conscience d’ordre didactique et culturel, c’est peut-être sur le plan humain que l’expérience a été la plus puissante. À travers la diversité de nos traits, de nos accents, de nos expressions, nous offrions une vision incarnée de la langue française, qui la donnait plus que jamais à percevoir comme une matière vivante. Une matière avec et dans laquelle se construisent et se creusent les ponts et les portes qui en font une « langue-monde ». De quoi donner un supplément d’âme et de sens à l’enseignement d’une langue qui, source de qualités et de plaisirs intellectuels par les exigences et les trésors de son usage, ouvre aussi un horizon si riche à qui désire l’embrasser. De quoi, en somme, redoubler d’ardeur dans notre mission commune !