Association française pour l’enseignement du français

Lecture Littérature

  • 26
    Fev

    Le motif du livre, par Joëlle Thebault

    Dossier littérature de jeunesse

    Le livre est souvent mis en scène dans la littérature, et la littérature de jeunesse ne fait pas exception. Catherine Tauveron, dans  L’aventure littéraire dans la littérature de jeunesse : quand le livre, l’auteur et le lecteur sont mis en scène dans le livre[1], y voyait même un genre en émergence. Les livres cités dans cet ouvrage sont le plus souvent destinés à des lecteurs de cycle 3 ou de collège. Mais aujourd’hui, la sélection ministérielle pour le C2 en témoigne, le genre semble s’être développé à l’intention des plus jeunes lecteurs.

    On peut ainsi prendre plaisir à découvrir des histoires dont le livre est le héros !

    Notre préféré est, sans conteste, l’un des plus simples, les plus actuels aussi : Lane Smith fait dialoguer le singe lecteur et l’âne technophile, qui s’interroge : « On peut faire défiler le texte ? ça envoie des textos ? » Et le lecteur de répondre : « Non, C'est un livre… » et il n’y a même pas besoin de le recharger !

    A ce sujet et beaucoup d’autres, on ne saurait trop recommander la lecture de Pinocchio et Robinson, pour une éthique de la lecture[2]. Dans la première partie, Comment Pinocchio apprit à lire, Alberto Manguel dit comment, à l’âge de 8 ans, il a aimé les aventures de Pinocchio, parce que ce sont « des aventures d’apprentissage ». Mais son propos est surtout d’expliquer pourquoi ce héros ne devient pas « celui qu’il est vraiment sous le bois peint ». Il devient seulement « un bon petit garçon qui a appris à lire) »… (p.10-11 « Pinocchio réussit à grimper les deux premiers échelons de l’échelle de l’instruction dans la société : l’apprentissage de l’alphabet et celui de la lecture superficielle d’un texte. Là, il s’arrête. Les livres deviennent alors des endroits neutres où appliquer ce code savant afin d’en extraire à la fin une morale conventionnelle. L’école l’a préparé à lire la propagande.» (p.18-19)

    « Il assimile les mots vus sur la page mais ne les digère pas : les livres ne lui appartiennent pas vraiment parce qu’il est encore, à la fin de ses aventures, incapable de les appliquer à son expérience de lui-même et du monde.» (p.20-21) 

    On voudrait tout citer de ce livre, qui met en évidence le paradoxe dans lequel sont pris les enseignants, dénonce l’hypocrisie des pseudo-hommages rendus à la culture, en même temps qu’on retire l’investissement mis dans les bibliothèques…

    Pour que nos élèves ne soient pas des pantins, emmenons-les : « Pour aller plus loin et plus en profondeur, pour avoir le courage d’affronter nos peurs, nos doutes et nos secrets cachés, pour mettre en question le fonctionnement de la société à notre égard et celui du monde, il nous faut apprendre à lire autrement, différemment, afin d’apprendre à penser.» (p.27) 

    Parmi les propositions de lecture qui suivent, la plupart sont très en deçà de cette ambition. Mais si nous amenons les élèves (qu’ils sachent ou non décoder) à relier ces livres à leurs expériences, ils seront sur le bon chemin.

     

     

     



    [1] CRDP de l’académie de Grenoble 2002, p.87.

    [2] Alberto Manguel & l’Escampette éditions, 2005

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