Association française pour l’enseignement du français

Manifestations et Colloques

  • 06
    Déc

    Journée d'étude : L'acquisition du langage, une linguistique ?

    ESPE de Paris, 9 décembre

    L’ACQUISITION DU LANGAGE, UNE LINGUISTIQUE ?

    Vendredi 9 décembre 2016
    Lieu : ESPÉ DE PARIS (10 rue Molitor, Paris 16, métro : Molitor) salle B02 

    Journée d’étude coordonnée par Christiane Morinet et par Phil Doray

     

    Intervenants :
    Sandrine Burgat (Université Paris 8, UMR 7023 Structures Formelles du Langage), Odéric Delefosse (Université Paris 3, ex-Calipso), Phil Doray (Université Paris 3, Clesthia), Natacha Espinosa (Université Paris Nanterre, Modyco), Christiane Morinet (Université Paris 3, Clesthia), Jérémi Sauvage (Université Paul-Valery-Montpellier 3).

     

    Programme

    Matinée

    9.00 : Accueil et présentation des objectifs de la journée (rappel de l’historique de l’équipe Calipso équipe aujourd’hui associée à Clesthia)

    9.30 – 10.00 : « Le rôle du linguiste dans une réflexion interdisciplinaire », Jérémi Sauvage 10.00 – 10.30 : « Quelle linguistique pour un retour à l’écrit ? », Odéric Delefosse

    Pause
    11.00 – 11.30 : « Acquisition de la secondarisation », Christiane Morinet

    11.30 – 12.00: « Jouons à penser en langue », Phil Doray 12.00 - 12.30: Discussion

    Après-midi

    14.00 – 14.30: «Acquisition du langage chez l’enfant sourd signeur dans une optique bilingue : l’oralité et l’écriture », Sandrine Burgat

    14.30 – 15.00 : « Jouer en ensemble en maternelle : quelles interactions langagières ? Natacha Espinosa

    15.00 – 17.00 : Table ronde présidée par O. Delefosse

    Elle s'ouvrira sur une présentation du Tripot linguistique par Phil Doray, suivie de celle du projet À l'école de la langue qui lui est directement associé.

     

    Le rôle du linguiste dans une réflexion interdisciplinaire

    Jérémi SAUVAGE, Université Paul-Valéry – Montpellier 3

    La question de l’interdisciplinarité de l’acquisition du langage comme objet d’étude, de recherche et de pensée reste toujours d’actualité. Si l’histoire peut nous donner des indications sur la prégnance de la psychologie sur la linguistique depuis une quarantaine d’année (Piaget a battu Chomsky par chaos à Royaumont), il n’en est pas moins vrai que « Linguistique » et « Psychologie » se sont toujours intéressées à ce même objet depuis l’époque contemporaine que l’on pourrait arbitrairement situer un peu après le milieu du 19e siècle (Lobish, 1851 pour la psychologie ; Taine, 1876 pour la linguistique).
    Quelles sont donc les spécificités, les avantages d’une approche linguistique de l’acquisition ? A contrario, quelles en seraient les inconvénients ? Premièrement, il conviendrait de revenir à l’essentiel de l’objet à étudier : le langage de l’enfant, c’est-à-dire dans sa double dimension, à savoir la compréhension et la production. Etudier les différentes étapes du développement linguistique chez les enfants doit permettre de mieux comprendre l’évolution (la dynamique ?) du développement humain, notamment celui du langage. Deuxièmement, la dichotomie disciplinaire n’ayant plus lieu d’être depuis la redécouverte des travaux de Vygotski à partir de 1985, cet objet « parole-langue-langage » ne peut (ne doit) plus être isolé du développement cognitif, émotionnel, neuronal, physiologique, social, etc.
    Mais le rôle du linguiste reste tout aussi prépondérant que ses collègues des autres disciplines dans la mesure où le travail interdisciplinaire ne peut, par définition, être efficient que dans une collaboration entre spécialistes de chaque discipline. Sans parler de l’étiquette « psycholinguistique », le linguiste aura la possibilité de poser des problématiques « classiques ». Par exemple, la construction du rapport signifiant/signifié reste une entrée linguistique tout à fait pertinente, alors même que la psychologie s’intéressera aux processus de catégorisation et de mémorisation. La dimension sociale (interactive) telle qu’elle est développée depuis Lentin (1972) jusqu’à aujourd’hui, trouvera également son pendant linguistique (sociolinguistique interactionnelle) tout autant que psychologique (psychologie sociale).
    Nous proposons donc dans cette communication, de revenir sur cette longue histoire entre psychologie et linguistique, pour mieux insister sur le rôle du linguiste, sur une approche linguistique de l’acquisition.

     

    Quelle linguistique pour un retour à l’écrit ?

    J.-M. Odéric DELEFOSSE, Professeur émérite en Sciences du Langage, Ex responsable de l’EA 170, CALIPSO « Acquisition, Interactions, Cognition, Pratiques Sociales du Langage », Université de la Sorbonne Nouvelle - Paris 3
    L’échec scolaire est majoritairement dû, en France, à une méconnaissance de la culture d’écrit et des contraintes propres à l’écrit (production et lecture de textes).

    On s’interrogera sur les raisons d’un tel désastre humain et social et des moyens d’y remédier. S’agissant de la mise en œuvre de la langue, la linguistique est nécessairement convoquée. Mais quel angle théorique, quels concepts sont-ils pertinents pour nourrir efficacement une démarche de retour vers l’écrit de publics de faible niveau de littératie, notamment les adolescents en échec et les adultes dits ‘illettrés’.

    A partir d’une expérience diversifiée sur une longue durée, l’auteur dégage les contours d’une « linguistique de l’acquisition » qui rend compte de la première acquisition du langage oral par l’enfant, de son rôle dans l’apprentissage de la langue écrite et des modalités de remédiation.

    Cette démarche de retour à l’écrit suppose nécessairement la maîtrise de l’orthographe par l’apprenant. Cette dernière phase est largement facilitée par le recours à l’étymologie, dont l’ouvrage de Ph. Doray (2015) donne les clefs indispensables.

     

    L’acquisition de la secondarisation

    Christiane MORINET, chercheure associée à Clesthia, Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris 3
    L’anthropologie de l’écrit (Goody, 1968, 1979) et la sociologie du langage (Bautier, 1995, 2005) ouvrent des perspectives pour comprendre le phénomène de l’« échec scolaire » et ses répercussions jusqu’au lycée en France. Les notions de littératie et de secondarisation développées depuis peu dans les milieux enseignants font sortir de l’ombre les processus qui fondent l’acquisition de l’écrit. Retenant, le caractère invisible de la secondarisation dans les activités langagières à l’école, on cherchera à créer les contions de l’observation du processus dans le cadre d’une formation à l’enseignement.
    Après avoir repris la définition de la secondarisation à partir des travaux de l’équipe Escol (Bautier, Rochex, 1998, 2002), la communication analysera des productions écrites d’étudiants qui se destinent à l’enseignement. Ceux-ci répondent à une consigne de synthèse d’un préambule de chapitre sur la secondarisation (Bautier, 2005). Si, comme on peut le lire dans ces travaux, les enseignants eux-mêmes n’ont pas conscience de ce procédé qu’ils pratiquent, il semble nécessaire de suivre la manière qu’adoptent ces futurs enseignants pour en prendre conscience.
    La prise de conscience de la secondarisation que ces étudiants maitrisent encore partiellement émerge de sa mise en œuvre dans les activités langagières orales et écrites. La réalisation que les mots d’une «méthode» appris comme «techniques» sont, de fait des opérations mentales, est transformatrices intellectuellement. On pourrait parler de « penser en langue ». Lien émission de radio :
    Quand on sait lire, est-ce qu'on parle différemment ? - RFI https://www.youtube.com/watch?v=2ILiS3LVfoY

     

    Jouons à penser en langue,

    Philippe DORAY, lexicographe, docteur en sciences du langage, Ex membre de l’EA 170, CALIPSO « Acquisition, Interactions, Cognition, Pratiques Sociales du Langage », chercheur associé à Clesthia, Université de la Sorbonne Nouvelle - Paris 3
    Ma présentation sera axée sur le jeu dans la langue, selon des manières de jouer que je propose avec un jeu de langue, dont je suis l’auteur, le Tripot linguistique, et par le jeu sémantique entre les mots français, latins et grecs, avec ÉtyMotsNotions1, ouvrage dont je suis aussi l’auteur. Les deux approches ludiques reposent sur l’écrit et illustrent les propriétés morphologiques du français de par son origine latine, elle-même très tributaire du vocabulaire grec. Qui dit « écrit » dit « littératie » pour la réflexion des acquisitionnistes enrichies par l’apport de l’anthropologue Goody.

    La théorie linguistique reposant sur les caractéristiques de l’écriture alphabétique est passée à côté de la langue chinoise dont l’écriture ne repose pas sur la transcription phonétique, si bien que le mot « littératie » ne peut pas lui être appliquée « à la lettre », c’est le cas de le dire. Bien au-delà de ces différences de transcription, mon travail sur l’écrit débouche finalement ... sur l’oralité, dont l’étymologie est la frontière même.

    Dans l’oralité, on trouve le sémantique à l’état premier, objet même des définitions de ma pratique passée de lexicographe, et des connaissances brassées par le vulgarisateur, complétées aujourd’hui de linguistique. Plus précisément je parlerai de la sémantique du vocabulaire, celui avec lequel nous forgeons nos connaissances dès les premières phases, orales, de l’acquisition.

    Lien émission de radio : http://www.rfi.fr/emission/20160713-ety-mots-notions

      

    Acquisition du langage chez l’enfant sourd signeur dans une optique bilingue : l’oralité et l’écriture.

    Sandrine BURGAT, Maître de Conférences en sciences du langage
    Université Paris 8, UMR 7023 Structures Formelles du Langage (Université Paris 8 et CNRS) 

    Aujourd’hui en France, les personnes sourdes locutrices de la langue des signes française (LSF) vivent dans un contexte diglossique. Les sourds représentent une minorité linguistique incluse à une majorité entendante dont la seule langue officielle, nationale, institutionnelle est le français. Etre sourd dans notre société signifie donc être sans cesse confronté à un écrit d’une autre langue.
    A ce jour, les langues des signes n’ont pas d’écriture. L’enfant sourd français qui apprend à écrire se voit donc contraint d’apprendre à écrire dans une langue qui lui est étrangère. Or, actuellement en France, la majorité des enfants sourds- alors même qu’ils sont sourds- apprennent à lire et à écrire par des pédagogies qui passent par la parole et l’audition. Dans le même temps, on constate qu’ils sont en difficulté face à l’écrit (80% des sourds sont illettrés
    1). Bien que de nombreuses interdictions concernant la LSF ont été levées et malgré les avancées législatives récentes, elle est encore peu utilisée dans l’enseignement et en particulier pour l’enseignement du français écrit.
    L’objectif de cette communication est de montrer comment on peut penser un apprentissage de la lecture-écriture chez l’enfant sourd signeur dans une optique bilingue.
    Nous discuterons de la place de l’oral, de l’oralité et de la LSF dans l’acquisition du langage et nous montreront comment des interactions en LSF peuvent permettre d’acquérir le français écrit via une approche contrastive des deux langues. Nous aborderons également la question du rapport complexe des sourds à l’écriture et nous présenterons des exemples de pédagogies bilingues.

     

    Jouer en ensemble en maternelle : quelles interactions langagières ?

    Natacha ESPINOSA, Maitre de conférences, Université Paris Nanterre, Modyco.
    On se propose de traiter de la question de l’acquisition du langage oral en maternelle en étudiant en particulier les interactions verbales adulte-enfant dans des situations de jeu à règle. Après avoir rappelé les hypothèses et les travaux issus d’une linguistique de l’acquisition qui favorise les interactions langagières pour la mise en fonctionnement du langage oral chez l’enfant, dans la perspective de son apprentissage ultérieur du lire-écrire (Lentin, Canut), nous proposons de montrer, à partir d’exemples, comment le jeu à règle peut être un support efficace pour développer chez l’enfant un langage oral complet et structuré.
    Les exemples présentées seront issus d’une recherche-action qui a abouti à la mise en place d’un dispositif et d’un outil piloté par l’AsFoReL « Jouer pour parler, parler pour jouer...le langage en jeu »®, proposé aux enseignants de maternelle ou dans le cadre des activités périscolaires.

    1 Ce chiffre est issu du rapport de Dominique Gillot : Le Droit des sourds : 115 propositions, rapport au Premier ministre remis en Juin 1998 

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