La rentrée de septembre verra arriver dans les classes les enseignants recrutés dans la phase transitoire de la réforme. Quel sort leur réserve-t-on ?
Une entrée dans le métier « accompagnée » ?
L’année rémunérée alternant stages et formation à l’IUFM est supprimée. L’organisation de la première année de recrutement passe entièrement aux mains de l’employeur. Les stagiaires se verront confier très vite la responsabilité entière d’un service, même si leurs compétences sont très éloignées des disciplines à enseigner.
Leur formation, qui consistera pour une grande part en entretiens avec le tuteur chargé de leur accompagnement, pourra être prise sur le « temps libre ». Des stages mis en place par l’inspection dans des conditions encore très floues complèteront. Les stagiaires pourront alors être remplacés par des étudiants de master 2.
Dans quelles conditions vont-ils découvrir le métier d’enseignant ? Souvent sans aucune expérience de la classe, ils feront face immédiatement à la surcharge de travail, l’absence de temps pour la réflexion, l’absence de lieu pour échanger avec leurs pairs avant longtemps…
L’inspection leur donnera des informations générales, le tuteur transmettra peut-être des indications pratiques : les erreurs à ne pas commettre au début, les « ficelles » du métier ? Il le fera comme il le pourra… On sait déjà que les rencontres seront difficiles à mettre en place, au moins pour une partie des stagiaires, en particulier dans le second degré où les emplois du temps sont difficilement compatibles. Que dire des cas où le tuteur et le stagiaire n’exerceront pas au même endroit ?
Même quand cet accompagnement se mettra bien en place, de quelle professionnalité s’agira-t-il ? Comme le déplore André Ouzoulias dans Le cauchemar de Jules Ferry, « Les débutants pourront trouver des réponses aux questions qu’ils se poseront (…). Mais assurément ils n’auront aucune réponse aux questions qu’ils ne se poseront pas… ». On s’achemine vers un processus de reproduction pure et simple des façons de faire de « collègues confirmés » qui seront « volontaires ».
Une élévation du niveau de qualification ?
Dès l’automne prochain se tiendront les nouvelles épreuves d’admissibilité. Les futurs enseignants seront en possession d’un master, quel qu’il soit. Les masters préparant aux métiers de l’enseignement (avec des stages facultatifs…) que diverses universités s’efforcent d’élaborer, malgré la confusion des directives ministérielles, sont donc mis en concurrence avec d’autres. Les étudiants, qui doivent assumer financièrement 5 années de préparation au lieu de 4, se demandent quelle voie choisir entre ces formations : quelle transparence, en l’absence d’un cahier des charges national ? Cet été s’annonce très favorable aux enseignes privées !
Les IUFM n’ont malheureusement pas fait la preuve de leur efficacité. Une vraie réforme était souhaitée par beaucoup d’acteurs du monde éducatif. Les universités auraient pu bâtir de nouvelles pistes de construction de la professionnalité… si on leur en avait donné les moyens, en particulier le temps de la réflexion dans un cadre national clair. Au lieu de cela, ce sont les contempteurs du « pédagogisme » qui ont eu gain de cause.
On a le sentiment d’assister à une démolition en règle. Ceux qui sont chargés de reconstruire (voir les interventions du 8 mai) s’attèlent à la tâche, envers et contre l’institution même…