Association française pour l’enseignement du français

Nos engagements

  • 13
    Jan

    Compte-rendu de l'audience accordée à l'AFEF par le Conseil Supérieur des Programmes

    le 9 janvier 2014

    Sur le site du M. E. N.  : Calendrier de travail du CSP jusqu'en 2015
     

    Compte-rendu de l'audience accordée à l'AFEF par
    le Conseil Supérieur des Programmes

    (le 9 janvier 2014)

     

    Lire le compte-rendu en version word

     

    Une délégation constituée de quatre membres du Conseil d'administration ou du bureau de l'AFEF a été reçue durant une heure par deux membres du Conseil Supérieur des Programmes, Monsieur Alain Boissinot, ancien Recteur de l’académie de Versailles, Inspecteur Général de lettres, qui préside le Conseil, et Monsieur Eric Favey, ancien instituteur, secrétaire général adjoint de la Ligue de l’Enseignement, co-responsable du Collectif des Associations Partenaires de l’École (CAPE).



    Nos priorités

    Pour présenter notre association, que nos interlocuteurs connaissaient ou sur laquelle ils avaient pris soin de préalablement s'informer à travers notre site, nous avons choisi de mettre l'accent sur les trois principaux axes qui motivent ou guident notre action et nous semblaient prioritaires pour répondre à cette audience qui nous avait été proposée.
    1. Tout d'abord notre refus de l'aggravation des inégalités telle qu'elle est mise en évidence en particulier par l'évaluation PISA. Refus qui nous mobilise d'autant plus que ce phénomène se joue dans notre discipline d'une part, et que le rapport à la langue joue également un rôle discriminant dans les autres disciplines.

    2. Nous avons ensuite exprimé le malaise des enseignants du premier degré et du collège. Certes les causes en sont multiples, mais on ne peut ignorer le rôle joué par la désorientation consécutive à la succession rapide de programmes assortis d'injonctions parfois contradictoires, aux polémiques ainsi suscitées, et à l'alourdissement des tâches et missions dévolues à l'école et aux enseignants et par conséquent à leur émiettement.

    3. Enfin nous avons souhaité mettre l'accent sur la nécessité impérative de restaurer une véritable formation initiale et continue, alliant la solidité de connaissances actualisées, avec une professionnalisation appuyée à la recherche.
     


    Les échéances et la méthodologie du CSP

    En réponse à nos interrogations sur les modalités de travail du C.S.P. monsieur Boissinot a précisé les échéances à venir.
    Le C.S.P. devra proposer dans les deux mois une charte des programmes pour fixer une méthodologie de travail dans laquelle les différentes associations pourront trouver leur place. Parmi les principes qui guideront cette charte figure la volonté de ne pas donner le tournis aux enseignants, de procéder avec pragmatisme et d'inscrire ces travaux dans la durée. Ainsi, prévoir la mise en œuvre à la rentrée 2015, en tenant compte du temps d'élaboration des manuels, obligerait à promulguer ces programmes dans les trois mois à venir. Le CSP, en accord avec le Ministre, se fixe donc l'horizon plus réaliste de la rentrée 2016. Toutefois, pour répondre aux urgences exprimées lors de la consultation sur les programmes du primaire, le CSP se propose d'introduire pour l'année prochaine, des aménagements et des allègements dans les actuels programmes de 2008.
    D'ici la fin de l'année scolaire, vers les mois de mai-juin, il devra proposer une nouvelle présentation du socle prenant en compte le fait qu'il s'agit d'un socle de connaissances, de compétences et de culture, revenant sur une conception du décloisonnement qui produit de la dilution et empêche de penser la progression, et rompant avec le pointillisme et le technicisme d'une certaine représentation des compétences pour en retenir l'avancée essentielle : l'attention à la réalité des acquisitions des élèves.
    Dans les mois à venir devront paraitre les programmes de maternelle.

    A partir du moment où une charte aura défini des orientations, une philosophie d'ensemble, de grandes orientations pour les programmes, il restera à les décliner par cycles - Alain Boissinot a rappelé l’attachement du Ministère et du CSP à un cycle intermédiaire regroupant CM et 6ème - et par champs disciplinaires en se recentrant sur les grandes perspectives, sans prétendre tout légiférer. Dans ce cadre, il sera possible pour l'AFEF, comme pour les autres associations, d'apporter sa (ses) contribution(s)



    La question de la "maitrise de la langue"

    Dans les échanges qui ont suivi, en concentrant nos interventions sur la démonstration que les programmes prennent leur sens, leur pertinence et leur efficacité s’ils sont portés par des conceptions pédagogiques centrées sur le développement et l’accompagnement des élèves, nous avons dans un premier temps choisi de revenir sur la "maitrise de la langue", soulignant qu’il convient d'inverser la succession de l'exposition de savoirs et des pratiques conçues sous forme d'exercices, d'entrainements. Nous avons repris l'idée des "pratiques réfléchies des langages et de la langue" présentée par Dominique Bucheton lors de la journée AFEF du 16 novembre. Les apprentissages s'enracinent dans des pratiques disciplinaires, littéraires, sociales. L'écriture y joue un rôle fondamental et il faut qu'un enfant écrive au moins deux heures par jour. Mais la pédagogie de projet, ou du moins une conception de la pédagogie de projet, a fait croire que l'expérience pouvait suffire à la construction implicite des savoirs. Les faits ont montré qu'il n'en est rien. Les apprentissages doivent être formalisés dans la verbalisation et l'explicitation des savoirs. Dans la continuité du premier degré et du collège un élève doit à la fois construire un certain nombre d'automatismes (penser par exemple à l'orthographe) et une représentation complexe de la langue ainsi que les compétences pour l'utiliser de façon flexible dans des langages adaptés.
    Ainsi l'articulation des notions de curriculum et de programmes est dans la distinction entre la prescription et ce qui est réalisable. Nous ne pouvons être contre cette prise en compte du réel. Nous avons toutefois insisté sur le fait que la notion de curriculum, employée souvent au pluriel pour traduire la variété des façons dont les personnes l'accomplissent, ne doit pas couvrir une reconstitution de filières. Nous avons mis en avant que les apprentissages constituent un continuum.
    Un tel continuum est inscrit dans une temporalité longue, celle des apprentissages, qui n'est ni celle du politique et des évaluations des politiques publiques, ni obligatoirement celle décrétée par les prescriptions.
    Interrogés sur la place du numérique, nous avons tenu à distinguer ce qui relève de l'appropriation d'un outil supplémentaire et ce qui concerne l'analyse et l'appropriation des évolutions qu'il introduit dans l’écriture et la littérature. Nous avons toutefois indiqué que nous avions d'ores et déjà commencé à collecter des expériences d'utilisations très efficaces sur le terrain.
    Nous avons également glissé un mot au sujet de l'orthographe rectifiée. Celle-ci a été évoquée au Conseil Supérieur des Programmes, qui, sensible à l’argumentation d’une des collègues du CSP, ne semble pas hostile à l'idée de l'utiliser dans ses propres publications.



    La culture humaniste

    Même si le temps nous a manqué pour développer cet axe comme nous l'aurions souhaité, nous avons tenu à rappeler l'importance de la littérature dans notre professionnalité et en tant qu'expérience nécessaire à la construction de chaque élève en tant personne et citoyen.
    Alain Boissinot a répondu à nos préoccupations en affirmant la nécessité de réinventer les humanités, de rouvrir le champ du français par la réintroduction de la question des valeurs, de sa contribution à l'enseignement moral et civique, et la place faite à l'oral pour la formation. Un socle de (connaissances, de compétences et de) culture, a-t-il affirmé, c'est  aussi une construction en termes de valeurs, d'émotions... qui donne toute leur place à la littérature et aux arts.



    Perspectives

    Cette audience s'est avérée plus encourageante que celle d'octobre 2012 au Ministère : nous avons eu le sentiment d’être écoutés très attentivement, voire entendus.

    Il nous apparait que nous devrons veiller à l'ambition des objectifs curriculaires. On peut admettre, en fonction du principe de réalité, qu'il peut être impossible de décréter une norme nationale univoque, il est positif de mettre en avant l'expérience acquise par les acteurs de terrain mais il ne faudrait pas contribuer à creuser les inégalités territoriales en fermant les yeux sur leur accentuation et sur la façon dont l'école peut contribuer à l'aggravation des inégalités sociales en perdant de vue les exigences des apprentissages.
    Il ne s’agit pas de rester sur la défensive, au contraire. Il est urgent que nous parachevions notre nouveau manifeste afin d'être à même d'alimenter le débat qui s'annonce par des propositions collectivement élaborées et portées, qui ouvrent pour les enseignants un espace de pensée, d'ajustement aux élèves, et de créativité. Cette démarche doit s’accompagner de l’élaboration de propositions pour la formation. Nous avons quelques mois pour agir. Chacune des rencontres à venir doit y contribuer : c'est le chantier de l'année pour l'association. Cette opportunité de faire entendre notre voix, dans le dialogue avec nos partenaires et en amenant le débat sur la scène publique, ne se représentera pas deux fois. Retroussons nos manches, à nos plumes et nos claviers !

     

1 Commentaire

  • GERLAUD

    19 Jan 2014 à 18:13

    Bonsoir,

    je suis très étonnée de constater qu'une fois encore le lycée qu'il soit général, polyvalent ou professionnel est oublié. La souffrance des enseignants dont il est question ne me semble pas concernée uniquement le primaire et le collège. J'enseigne depuis 18 ans au lycée Saint Exupéry de Mantes la Jolie et ne peux que constater le "décrochage professionnel" de beaucoup de collègues. La dernière réforme accentue considérablement cette souffrance : des classes surchargées (35), des dispositifs qui se multiplient (TPE, enseignements d'exploration, accompagnement personnalisé ...), des heures en moins, une prise en charge de davantage de classes. Un certifié de lettres modernes a au minimum 4 classes maintenant = 140 élèves. Comment tenir compte de la singularité de chacun ? Je n'évoque pas évidemment les problèmes de gestion des couloirs (de moins en moins de surveillants) et les problèmes de comportement de ces jeunes. Comme il n'y a plus assez d'enseignants, la pression de l'institution pour assurer des heures supplémentaires est à son comble. Culpabilisation outrée !!! Nous pourrions aussi évoquer les élèves de baccalauréats professionnels qui accèdent au BTS et dont les compétences sont pour le poins problématiques : aucun moyen supplémentaire pour ces jeunes à l'auto-dévalorisation accablante pour notre institution. Comment faire adopter une posture réflexive bienveillante à un jeune en 2 heures par semaine (avec évidemment un programme non adapté ...) ? Non décidément le lycée aussi va mal ou plutôt certains lycées ...
    Cordialement
    Béatrice Gerlaud

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