Association française pour l’enseignement du français

Qui sommes-nous ?

  • 27
    Sep

    Traquer les assassins des assassins…  Nous avons mieux à faire pour l’école. Viviane Youx

    Réponse de l’AFEF à l’article du Point, « Ils ont tué l’école ! », et à l’ouvrage de Carole Barjon, « Mais qui sont les assassins de l’école ? »

     

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    Est-il besoin d’en rajouter ? La promo assassine assurée par le Point[1] à un ouvrage[2] dont le projet médiatique saute aux yeux – couverture rouge, « assassins » au milieu du titre en blanc et noir, l’ Affiche rouge… – fait dans le visuel. Huit photos, huit hommes ou femmes à abattre, vite catalogués, font l’accroche. Une femme faisant la moue leur répond en page suivante. Le ton est donné dès la première ligne de l’article : « Notre école, on le sait, va mal ». La longue phrase qui suit prouve l’évidence de ce constat. Pour se terminer par une autre évidence, ce nouvel « essai au vitriol » permet, enfin, de désigner les coupables, oh désolée, « les vrais responsables du naufrage ».

     

    Une telle désignation à la vindicte populaire des boucs émissaires d’un désastre consommé fait sourire, ce procédé grossier mérite-t-il autre chose que d’être raillé ? Sommes-nous assez crétins pour nous laisser avoir par cette « galerie de portraits […] captivante » et par la conclusion qu’en tire la journaliste du Point sur les « leçons à tirer d’urgence » ?
     

    Mais l’AFEF[3] est citée dans un des extraits de l’ouvrage.
    Nous pouvions juste faire remarquer qu’un raccourci sanglant[4] induisait en erreur. Nous renvoyions alors la journaliste et l’auteure dans les cordes en gagnant du temps.
    Or, nous n’avons pas l’habitude de parler et d’écrire sans sources. Il fallait donc lire le livre, rapidement, pour comprendre l’étendue des dégâts. Nous osions espérer que l’article du Point en faisait trop. Que l’auteure de l’ouvrage, journaliste à l’Obs, aurait fait preuve d’un peu de rigueur documentaire.
     

    Hélas non ! Après une ouverture sur sa connaissance de l’école grâce au vécu de ses enfants, elle annonce son projet de faire du français sa cible centrale, et procède, chapitre par chapitre, au dézingage de ses boucs émissaires, avec des titres dignes d’un roman de gangsters. Rien de nouveau dans les critiques, rassurez-vous : la méthode globale, le jargon, la pédagogie qui ont détruit la grammaire et l’orthographe. Et rassurez-vous aussi, les solutions existent, chez ceux que l’auteure a pris le temps de rencontrer, des gauchistes repentis sur les questions scolaires : l’éternel Brighelli ; et Joste et Boutonnet, de « Sauver les Lettres », qui cumulent avec Le Bris une proportion écrasante de références d’enseignants, les seuls trois à être nommés.


    Oh, si ceux-là ont changé depuis leurs débuts, bien leur en a pris, c’est qu’ils ont compris, eux ! Quant aux chercheurs et politiques pourfendus, les « pédagogistes », quand ils infléchissent leurs positions avec le temps et les résultats de la Recherche, ils ne méritent que d’être raillés pour leurs errements grossiers. Les seules sociologues que l’auteure semble avoir lues pour appuyer son propos sont Garcia et Oller[5], citées douze fois. Ce qui ne l’empêche pas de parler d’autres chercheurs pour les dénigrer, sans sources sérieusement analysées. Et de citer l’AFEF plusieurs fois, sans avoir pris le temps de nous rencontrer. Ni même de se rendre sur le site de l’association[6] où se trouvent beaucoup des informations dont elle aurait eu besoin, notamment historiques[7].
     

    Nous attendions mieux d’une journaliste politique de l’Obs, au moins un minimum de rigueur documentaire : entendre plusieurs voix, valider ses sources, fonder son opinion sur une recherche et non des aprioris. Une critique constructive sur certains points aurait pu faire avancer la réflexion. Mais encore faut-il prendre le temps de l’analyse et de la confrontation. Nous n’irons pas plus loin dans la présentation de cet ouvrage, ses sous-titres, ses fausses conclusions. Un conseil, ne perdez pas de temps à le lire. Oublions-le vite. Traquer les assassins des assassins… Nous avons mieux à faire pour l’école.

     

    Viviane Youx, présidente de l’AFEF

     

    Pour comprendre la teneur des attaques : 

    Lire l'article de Violaine de Montclos "Ils ont tué l'école !", Le Point 15/09/2016 en PDF

    Lire aussi l'article de JP Brighelli "Les fossoyeurs de l'école démasqués", lepoint.fr 24/09/2016 en PDF



    [1]Ils ont tué l’école ! Violaine de Montclos, Le Point 2297, 15 septembre 2016, p. 70-72

    [2]Mais qui sont les assassins de l’école ?, Carole Barjon, Robert Laffont, 22 septembre 2016

    [3]AFEF, Association française des enseignants de français, http://www.afef.org/

    [4]Alain Boissinot n’a jamais pris le « contrôle » de l’AFEF, il a fait partie, de 1979 à 1982, d’un collectif de quatre personnes à la présidence.

    [5]Réapprendre à lire. De la querelle des méthodes à l’action pédagogique. Sandrine Garcia et Anne-Claudine Oller, Le Seuil, Sciences Humaines, 27 aout 2015

2 Commentaires

  • Chartreux

    07 Oct 2016 à 18:49

    http://www.profencampagne.com/2016/09/soutien-aux-assassins-de-l-ecole.html

    Soutien aux "assassins de l'école"...

  • MALBOSC

    09 Oct 2016 à 16:50


    Répondre à C. Barjon serait faire de la publicité à son « ouvrage » et se placer à un niveau qu’elle ne pratique pas : celui de la réflexion, de la pensée, de la rigueur, de l’honnêteté intellectuelle. Même chose pour les articles d’hebdomadaires qui se sont fait les thuriféraires de ces propos.

    Il conviendrait plutôt, selon moi, parce que c’est notre rôle d’association de formateurs et d’enseignants, de se placer sur le terrain de fond. Avec des réponses à ces questions centrales, jamais évoquées par les médias ni même par la plupart des politiques : pourquoi vouloir faire réussir tous les élèves ? Ou, autrement dit, quelle LA finalité du système éducatif ?
    Deux réponses, qui n’ont pas être hiérarchisées. La première est que chaque enfant le vaut. Comment être enseignant ou formateur si l’on ne croit pas aux capacités d’apprentissage et d’évolution de ceux dont on a la charge ? La question qui vient après celle-ci est comment. Surement pas par des rabâchages et du par cœur, comme le voudrait un des thuriféraires (à la fin d'un article du Point). Mais c’est une question qui a elle seule nécessiterait des volumes entiers.
    La seconde réponse à la question de fond est qu’il faut assurer le plus haut niveau possible de formation générale des individus parce que nous ignorons quels seront les métiers disponibles, pour une bonne part d’entre eux, dans 30 ans. Quelles compétences donner aux enfants actuellement en maternelle pour qu’ils trouvent un métier à l’âge adulte ? La seule réponse possible est qu’il faut leur donner un haut niveau de connaissances et de compétences, des envies d’apprendre et de continuer à apprendre, la capacité à se poser des questions et à y trouver des réponses, pour pouvoir se déterminer face à des conditions de vie et de travail qui évoluent et continueront d’évoluer.
    En avril, peu après la parution du projet de réforme du collège, Bruno Le Maire a été opposé à la ministre de l’éducation nationale sur le plateau de itélé. Par deux fois, elle lui a dit qu’il fallait élever le niveau général d’instruction de la population pour assurer l’avenir du pays. Pas une fois le candidat à la primaire de la droite n’a embrayé ni répondu, parlant plutôt d’orientation à 14 ans.
    Une députée LR d’Isère, ou de Savoie, je ne sais plus, disait récemment sur un plateau de télévision que l’Allemagne avait moins de chômage des jeunes parce que l’apprentissage y était beaucoup plus développé, avec une orientation dès 12 ans. Ce qu’elle ignore, ou feint d’ignorer, est que si l’Allemagne a beaucoup d’ouvriers et de techniciens bien formés, elle souffre d’un manque d’ingénieurs et fait volontiers appel à des étrangers. Et certains dans le pays disent que c’est parce que le niveau général est trop faible, l’orientation étant trop précoce. Le système de formation continue tente d’y remédier, mais avec quelles difficultés et quel cout ?
    Sans vouloir caricaturer, on peut donner des exemples d’évolution de métiers : le chaudronnier doit-il encore savoir former une casserole au marteau à partir d’une plaque de tôle ? Quel garagiste règle encore le moteur d’une voiture à l’oreille ?....

    Et parmi ces compétences indispensables pour l’avenir, la première concerne l’usage de la langue, à l’écrit et à l’oral, dans toutes les disciplines quand on est à l’école, et dans des circonstances très variées, à l’école et en dehors de l’école.

    C’est de cela qu’il faut parler. Le reste est bavardage de café du commerce, occupation médiatique, remplissage de colonnes de journaux, bref sans grand intérêt, si ce n’est celui de montrer la vacuité du débat et les forts ressentis idéologiques, que l’on peut également percevoir dans un article du Monde de samedi 8 octobre, sur l’absence de « choc PISA » en France, contrairement à ce qui s’est passé en Allemagne : pourquoi ce manque de réactions, tant politiques que dans la population ? La réponse tiendrait sans doute dans le fait que chacun s’accommode du fonctionnement inégalitaire du système, tant il est persuadé que les défavorisés, ce sont les autres et que des défavorisés, il y en aura toujours et même qu’il en faut !

    Apprendre à nos élèves à débattre et à argumenter est aussi une de nos missions, pour éviter que la violence, celle des propos de ce livre, à commencer par le choix du titre, comme la violence verbale dont font preuve certains politiques, ou la violence physique dans les cours de récréation ou dans la rue, ne soient les seuls moyens de s’exprimer.


    Gérard Malbosc
    IEN Honoraire

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