Association française pour l’enseignement du français

Appels de l'AFEF

  • 21
    Jan

    Langages, citoyenneté, éducation : l'école en panne ? Que faire maintenant ?

    Appel de l'AFEF - Montpellier - à relayer largement

    Langages, citoyenneté, éducation : l'école en panne ? Que faire maintenant ?

     

    Les évènements de ce début de janvier reposent avec force les responsabilités de l'école dans sa capacité à faire penser, faire parler, faire dialoguer et surtout entendre les élèves dans leur diversité. Pouvons-nous, didacticiens du français, chercheurs, formateurs, enseignants, contribuer à la prise de conscience qu'une terrible brèche vient de s'ouvrir sous nos pieds, brèche que quelques vagues pansements ne sauraient colmater ? Pouvons-nous au delà de nos émotions, nos engagements respectifs au service de l'école, faire un examen de conscience approfondi de notre part de responsabilité ? Pouvons-nous revenir sur nos pas, regarder derrière nous pour comprendre comment et pourquoi le système éducatif a lentement perdu le cap de ses missions fondatrices : instruire, former mais aussi éduquer aux valeurs qui fondent l'humain et la vie sociale, accompagner à égalité tous les élèves dans la construction de leur personne et de leur avenir ? Comprendre comment depuis environ trente ans le projet fondateur de l'école de la République a bifurqué de réformes en réformes, de ministre en ministre, de traité européen en injonctions et évaluations européennes, laissant de plus en plus d'élèves sur le côté, tout particulièrement ceux des quartiers et établissements transformés en nouveaux ghettos ? Comprendre comment la communauté éducative a pu à ce point s'assoupir et perdre toute vigilance ?

    Pour ne donner qu'un exemple, comment par exemple avons-nous pu accepter au prétexte de multiples arguments (programmes lourds, classes surchargées, évaluations à préparer, injonctions nouvelles) que dans les classes du primaire, du collège, voire du lycée et de l'université, les élèves n'écrivent, ne lisent et ne discutent que très peu ? Comment avons-nous pu croire aussi que le principe démocratique d'égalité, de liberté d'expression, pouvait s'enseigner en étant si fréquemment mis à mal dans le vécu quotidien de la classe ou de l'établissement. ?

    Et maintenant que faisons-nous ? Pour restaurer le dialogue, ouvrir des espaces où la pensée et la parole singulière de chaque élève, dès le plus jeune âge, se nourrit du débat collectif avec les pairs, mais aussi avec les auteurs, le savoir, la réalité d'aujourd'hui ?

    Il nous faut avant toute chose prendre le temps de la discussion entre tous les acteurs de la scène éducative. Les associations, la nôtre, l'AFEF peuvent y contribuer. Exiger du temps de l'argent, des chercheurs et formateurs pour accompagner, ajuster, évaluer des recherches-actions-formations, dans les quartiers difficiles, proposer des pratiques qui refondent en profondeur un métier qui en a grand besoin. Aller observer les pratiques dominantes, les programmes, analyser, comprendre les logiques et valeurs qui les sous-tendent et qui nous amènent aujourd'hui à une école où nombre d'élèves ne se retrouvent plus, ne comprennent plus.

    Prendre le temps de refonder profondément la discipline français. Les renouvèlements des programmes peuvent s'y prêter mais rien ne peut se faire sans des consultations longues, larges et lentes des enseignants, corps d'inspection, chercheurs, autres acteurs et organismes collaborant à l'éducation. Mais rien ne pourra se faire sans une claire définition de ce que cela veut dire enseigner le français, la langue, les langages, le lire, parler écrire, la littérature, l'image dans une société aujourd'hui de plus en plus multiculturelle.

    Il nous faut comprendre par exemple les problèmes concrets et urgents que posent les nouveaux moyens de communication, les questions qu'apporte le bilinguisme à l'école maternelle, comprendre les résistances des familles, des enseignants, accompagner les jeunes professeurs à surmonter les incompréhensions qu'une société de plus en métissée engendre, inventer des solutions ajustées. Il nous faut refonder courageusement la formation, bien mise à mal et en pleine souffrance et désarroi aujourd'hui : un chantier premier, pierre angulaire sur laquelle repose l'édifice éducatif.

    Ni optimistes inconscients, ni résignés déprimés, nous devons nous mobiliser. Nous n'avons pas le choix. Ensemble, il nous faut réfléchir, assumer les responsabilités qui incombent à l'école, «notre» institution, et retrousser les manches pour ré-inventer l'école et la société de demain. Refuser une société pour laquelle l'individualisme, la réussite par l'argent, l'égoïsme, la sélection coute que coute, le refus de l'autre différent de soi, sont les valeurs cotées en bourse.

    Travailler au contraire inlassablement dans toutes les classes, toutes les disciplines, à une société qui place le respect de l'humain, son développement, son épanouissement, la solidarité entre les hommes, et sur un autre plan, le respect de la nature qui nous accueille au cœur de ses objectifs éducatifs.

     

    L'AFEF (Association Française des Enseignants de Français, Régionale de Montpellier), vous invite à poursuivre avec nous la discussion : contact@afef.org 

    Dominique Bucheton, Brigitte Carayon, Hervé Dalle Nogaré, Martine Dreyfus, Catherine Dupuy, Hélène Faucanié, Sandrine Laux, Françoise Morel, Yves Soulé

4 Commentaires

  • Morinet

    24 Jan 2015 à 10:07

    La question de la langue dans tous ses états me semble fondamentale et je continue de m'y engager..

  • GERLAUD Béatrice

    25 Jan 2015 à 12:09

    Bonjour,

    je suis fort étonnée de la teneur du courrier que je reçois.
    Depuis des années sur le terrain (j'enseigne dans le Mantois depuis 25 ans), nous ne cessons d' hurler la difficulté croissante à enseigner. Seule réponse institutionnelle : de plus en plus de classes/dispositifs en charge et de plus en plus d'élèves par classe. Un enseignant de lettres modernes certifié de lycée est passé de 90-100 élèves à 140-150 par la dernière réforme. Comment voulez-vous tenir compte de la singularité avec des effectifs toujours plus importants voire mouvants (option littérature et société 1 heure tous les 15 jours en seconde...). Tant que le seul discours ne sera que celui de la performance et de la rentabilité, nous serons dans une impasse.
    Par ailleurs, il y a eu certes des difficultés à discuter autour de la liberté d'expression dans certaines classes mais peu au regard de ce que cela aurait pu être si nous n'étions pas des bastions (je serais même tenté de dire les derniers) de la démocratie sur le terrain. Enseigner-éduquer sont deux faces d'une même posture, à tel point qu'il n'est guère possible de les dissocier. Nous ne l'avons jamais oublié, nous !

    Je forme le souhait que tous les niveaux de notre institution se remettent en question. Par exemple, je suis choquée de recevoir une semaine après les attentats un document de l'Inspection nous donnant des conseils pour amorcer des discussions en classe : une semaine après ! Qui dissocie pédagogie et éducation ? Les classes technologiques (celles qui concentrent toutes les difficultés de la société) sont désormais à 35 : égalité des chances ? Comparons deux lycées (Léonard de Vinci de Levallois-Péret et Saint Exupéry de Mantes la Jolie) : égalité de traitement des élèves ? Je pense qu'il est grand temps de cesser cette hypocrisie !

    Alors par pitié pas de discours de responsabilisation-culpabilisation des enseignants, nous ne cessons de l'être. Si vous voulez accentuer la démotivation enseignante, il n'y a pas mieux. Pour ma part, je vais continuer à me battre pour ces mômes d'horizons, d'origines, de religions divers, comme je l'ai toujours fait, en me souciant de moins en moins de ce qui se dit "là-haut".

    Bien cordialement

    Béatrice Gerlaud, enseignante au lycée Saint-Exupéry de Mantes la Jolie, doctorante EMA.

  • c

    26 Jan 2015 à 11:58

    Le "prétexte" des classes surchargées, autrement dit le nombre d'élèves par classe, n' est ni un "argument", ni un prétexte. En zep, à 15, tu peux bosser; à 30, tu ne bosses pas. D'accord ?
    PS : "renouvELLEments!" et "coûte que coûte!". Putain, relisez-vous, les gars!

  • Viviane Youx

    26 Jan 2015 à 12:39

    Cher collègue,
    Avez-vous entendu parler de l'orthographe rectifiée de 1990, recommandée par les programmes de 2008 (primaire et collège), et que l'AFEF et sa revue appliquent depuis fort longtemps ? Elle préconise renouvèlement et coute que coute !!!
    Et, désolée, mais il n'y a pas que des gars à l'AFEF, loin s'en faut...
    Bien cordialement,
    Viviane Youx, présidente de l'AFEF

Commenter cet article

  • Nom *
  • Email
  • Site Web
  • Message *
  • Recopiez le code de sécurité *
  • ???
  •