Association française pour l’enseignement du français

Lycée général

  • 07
    Déc

    La place du français dans la réforme du lycée : annonces rassurantes et précipitation

    Compte-rendu de la rencontre du 3 décembre avec Jean-Paul de Gaudemar  au Ministère de l’Education Nationale

    A la rentrée de septembre, les premières informations sur la réforme du lycée ont suscité de nombreuses inquiétudes. L’organisation modulaire annoncée alors pouvait nous amener à imaginer un découpage de notre discipline entre des temps d’enseignement communs à tous les élèves, réduits en temps et objectifs, et des modules « Littérature » dont, en outre que nous voyions mal comment ils pouvaient s’articuler avec cet enseignement commun, nous pouvions craindre qu’ils n’évacuent purement et simplement la littérature du cours de français.

                    Le point d’étape présenté par M. Darcos, Ministre de l’Education Nationale, le 21 octobre, qui annonçait la répartition globale entre « enseignements généraux de tronc commun », « enseignements complémentaires sous forme de modules » et « accompagnement personnalisé » n’a fait qu’amplifier nos craintes : la division mathématique de l’horaire de 21 heures entre les 7 matières annoncées dans les enseignements généraux, l’intitulé « Littérature française » dans le pôle « Humanités » laissaient courir la rumeur d’une diminution d’horaire en seconde et d’un tronc commun plus tourné vers la communication, alors que la Littérature serait enseignée à part, uniquement pour les élèves qui l’auraient choisie.

                    Les réponses de M. de Gaudemar, lors de notre rencontre du 3 décembre, nous ont semblé plus réalistes et mesurées. Il nous rassure sur le rôle central du français dans les apprentissages et sur la place de la littérature dans l’enseignement du français. Il nous indique la répartition des modules, l’organisation de l’accompagnement personnalisé, et nous informe que les contenus sont en cours de préparation.

                    Si certaines de ses précisions sont de nature à nous rassurer, nous ne pouvons que nous inquiéter de la précipitation dans laquelle cette réforme est menée, ne laissant pas le temps d’une élaboration concertée. Les contenus d’enseignement et de modules nous sont annoncés pour noël, afin d’être soumis à consultation. Nous avons du mal à voir comment, d’ici la fin de l’année scolaire, l’organisation et les programmes pourront être adoptés et les enseignants correctement préparés à les mettre en œuvre dès la rentrée prochaine…

     

                                                                                                                                 Viviane Youx, présidente de l’AFEF

     

    ………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

     

    Ministère de l’Education Nationale - Rencontre du 3 décembre 2008

    Jean-Paul de Gaudemar – Eric Rozier (Ministère)

    Sylvianne Ahr – Viviane Youx (AFEF)

     

    Les questions que nous avons posées à M. de Gaudemar sur la place du français dans les programmes de lycée, actuellement en préparation, ont été les suivantes :

    -          En seconde : quels  contenus pour la discipline français ?

    -          Quel horaire pour le français en seconde ?

    -          Si les épreuves du baccalauréat restent identiques, comment préparer les élèves avec un horaire diminué ?

    -          Quelle architecture pour le module « littérature »? Quelles cohérence et progression des apprentissages entre le tronc commun « français » et le module « littérature » ?

    -          Quelle organisation pour l’horaire de soutien-approfondissement ? Quelle place dévolue à l’enseignement du français ?

    -          Quelle formation, quel accompagnement pour les enseignants ?

    -          Quels enseignants dans la dominante Humanités et Arts ?

     

    Réponses de M. de Gaudemar

     

    1.       La classe de seconde

    Elle doit être traitée indépendamment du baccalauréat, ainsi que du cycle terminal. Le bac devrait être l’aboutissement de la formation au lycée et non l’inverse.

    Le français est une discipline centrale dans les apprentissages : elle fait donc partie des enseignements généraux pour doter les élèves du début de culture générale à acquérir au lycée.

    L’horaire n’est pas encore décidé, et le ministre, dans son discours, a annoncé un horaire global de 21 heures, sans donner de détails. Cet horaire ne sera certainement pas 3h, il sera plus important (même s’il est difficile de parler à la place du ministre, à qui cette décision revient). N’est pas non plus encore déterminée la répartition entre classe entière et effectifs réduits.

    Le français fonde un bagage pour tous, en seconde il est important de développer et consolider ce que les élèves ont appris.

    On insistera en seconde sur la capacité à diagnostiquer le plus tôt possible des capacités d’élèves susceptibles d’être traitées par l’aide personnalisée au 2nd semestre, après un bilan d’étape au 1er semestre. L’accompagnement devra proposer des solutions pour profiter davantage du 2nd semestre.

    Le français est une discipline où la détection des difficultés sera primordiale (le français et les maths sont les deux disciplines symptômes)

     

    2.       Les parcours à dominante littéraire

    Les enseignements complémentaires à suivre par les élèves seront classés en dominantes.

    Dans la dominante « Humanité et Arts », le module « Littérature » sera à la fois un prolongement du cours de français, mais aussi et surtout une manière de voir la littérature sous un jour différent.

    Il devra encourager les élèves à une curiosité littéraire.

    Les modules auront une vocation exploratoire, les contenus d’enseignement devront être orientés par cette logique. Ils seront constitués par une brique de 3 heures sur un semestre et pourront intervenir en cycle terminal soit en dominante, soit en mineure.

    En cycle terminal, le français continuera à faire partie des enseignements généraux. On peut aussi imaginer une souplesse plus grande. Pourquoi ne pas continuer le français en terminale ? Pourquoi pas une composition différente, avec éventuellement un choix possible de faire tous ses modules sur un an ou de les répartir sur deux ans ? Ou de choisir un volume plus important ?

    Il faudra imaginer des scénarios avec une polyvalence scientifique et littéraire.

     

    3.       Contenus

    La reconstruction du lycée implique un travail sur les contenus. Un groupe de travail de l’Inspection Générale travaille sur les programmes des enseignements généraux. Des projets, en préparation pour la révision des programmes de français ainsi que pour le module « Littérature », devraient être connus d’ici Noël.

     

    4.       L’attractivité du module et du parcours littéraires

    Comment trouver cette attractivité ? Il ne faut pas faire en sorte que la littérature soit réservée à une seule filière en créant de la communication entre les parcours.

    La série S est la seule actuellement qui soit véritablement polyvalente aujourd’hui.

    On proposera une articulation entre majeures et mineures, de manière à faire disparaitre le caractère cloisonné des filières.

    Les modules d’exploration de seconde ne devront pas constituer des prérequis pour la suite.

    On peut se poser la question de contraintes dans le choix des modules qui permettraient d’éviter que ne pèsent sur le choix des élèves les influences sociales en fonction des débouchés, le ministre a choisi de ne pas mettre de contraintes.

    La conception des modules est surtout de permettre l’exploration, l’ouverture, ils ne doivent pas demander trop tôt un approfondissement qui bloquerait des choix ultérieurs.

    Dans l’articulation des modules en seconde, répondant à notre question sur la progression des apprentissages si un élève prend deux fois le module Littérature la même année, M. de Gaudemar précise qu’il ne faudrait pas répéter un module deux semestres de suite dans des disciplines déjà connues des élèves.

    Le module Littérature devrait avoir pour but de rendre les élèves actifs, il pourrait porter sur le travail de l’écrivain, de création.

     

    5.       La formation des enseignants

    Les enseignants devront être accompagnés par les inspecteurs qui devront mettre en place des formations à public désigné pour aider les enseignants avant la fin de l’année scolaire.

     

    6.       L’aide personnalisée

    A nos questions sur le schéma retenu (parallèle avec l’aide individualisée ?), l’effectif, la formation, le pilotage et la répartition des heures, M. de Gaudemar fait remarquer que l’aide individualisée a été dévoyée. On devra s’approcher d’une véritable aide personnalisée avec de petits effectifs.

    La notion retenue est celle d’accompagnement de l’élève, plus vaste, puisqu’elle inclut l’aide personnalisée, mais aussi l’aide à l’orientation, la préparation à l’enseignement supérieur par une aide méthodologique, des travaux de recherche…

    On peut imaginer une modulation des heures accordées aux élèves selon les situations.

    Il faut aussi prévoir une formation des maitres à pratiquer l’aide personnalisée, qui n’est actuellement pas dans la culture de notre système.

    Les enseignants doivent être au cœur de l’accompagnement des élèves.

    L’aide personnalisée en français doit être faite par des enseignants de français.

     

    7.       L’histoire des arts

    Qui enseignera l’histoire des arts ? Les enseignants qui ont la mention complémentaire, encore peu nombreux ? Dans tous les établissements, ou seulement dans ceux qui ont déjà une option Arts ?

    A court terme, nous serons prisonniers de la carte actuelle. Mais il faudra concevoir des options moins lourdes, plus faciles à implanter plus largement et envisager un dispositif à cercle territorial plus large.

    Il faudra aussi répandre plus largement la mention complémentaire, en favorisant l’habilitation par les corps d’inspection après certification.

     

    8.       Questions finales

    Comment renverser la pression sociale et familiale sur les filières ? Il faut répondre à la question que se posent les familles, elles ne seront convaincues que si elles voient les débouchés offerts par les différentes voies. Il faudra les convaincre que les parcours offrent une polyvalence plus grande utile dans ces débouchés.

    Le bac portera certainement l’appellation de la dominante sans nier la polyvalence.

    Plutôt que d’intituler le module « Littérature », Sylvianne propose « Culture littéraire ».

     

     

     

    Nous devrons réfléchir à la manière de rendre le module littéraire attractif par un contenu qui mette les élèves en activité ; une pratique littéraire ? L’intitulé reste à trouver.

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