L’enseignement du vocabulaire à l’école et au collège
Quelques pistes téléchargeables commentées[1]
Lire la sitographie en format doc
Ressources pour l’école primaire
NB : elles peuvent intéresser les enseignants de collège
http://eduscol.education.fr/pid25992-cid58555/elements-de-reference.html
Vocabulaire : éléments de référence, novembre 2011 (consulté le 13/05/13)
Ces documents mettent en lumière les enjeux de l’enseignement du vocabulaire tels qu’ils sont perçus aujourd’hui par des chercheurs clairement identifiés. Il s’agit bien d’éléments qui éclairent la réflexion didactique et non d’un texte cohérent[2] délivrant des instructions concrètes. Tous ne comportent pas de bibliographie, et celles qui sont fournies renvoient majoritairement à des ouvrages en anglais.
Le vocabulaire : pour dire et lire, Alain Bentolila (8 pages)
Enjeu : L'auteur définit précisément les enjeux d'un développement suffisamment étendu du vocabulaire pour permettre à chacun d'exprimer ses idées au plus près de sa pensée et d'entrer de manière efficace dans l'écrit et la lecture. C'est un enjeu de vie autant qu'une mise en jeu du destin scolaire.
L’auteur évoque le poids des mots, le rôle du contexte, la méfiance qui s’installe trop souvent envers les mots peu usités. Il plaide pour « l’éducation à un vocabulaire juste et fort. » Il esquisse des exemples d’activités allant en ce sens. Il souligne « l’importance décisive de la quantité et de la qualité du vocabulaire» pour qu’un enfant apprenne à lire : « c’est le déficit du vocabulaire oral qui empêche l’enfant d’accéder au sens des mots écrits. » Les inégalités dans ce domaine doivent être combattues par un apprentissage systématique du vocabulaire, qui passe par la décontextualisation des mots.
Texte tout à fait accessible, un peu général mais émaillé d’exemples, sans grandes surprises pour qui a lu des articles de cet auteur.
Le développement du vocabulaire à l'école primaire : les apports de la dimension morphologique de la langue, Pascale Colé(11 pages)
Enjeu : Développer le vocabulaire grâce à une analyse morphologique explicite des mots, tirer profit de la fréquence importante des mots complexes du vocabulaire oral et écrit à l’école primaire.
L’auteur souligne l’importance du vocabulaire dans la compréhension, et plus particulièrement le poids quantitatif des mots complexes dans les textes des manuels scolaires. « Un enseignement systématique à l’analyse morphologique constitue donc une piste de travail très prometteuse pour l’enseignement du vocabulaire. » Les traitements linguistiques nécessaires à la reconnaissance des mots complexes sont précisément expliqués à l’aide d’exemples. On voit aussi le rôle des connaissances morphologiques dans l’apprentissage de la lecture et la compréhension par inférence de mots nouveaux : « Selon les chercheurs, la maîtrise des règles morphologiques provoquerait un phénomène de « propagation » qui permettrait, chaque jour, pour chaque mot appris d’en comprendre en plus 1 à 3 (en moyenne) qui lui sont reliés morphologiquement. » Utiliser l’analyse morphologique est moins fastidieux et plus efficace pour comprendre un mot inconnu que le recours au dictionnaire (difficile à comprendre) ou au contexte.
Le texte est précis d’un point de vue linguistique, mais les mots savants y sont en nombre limité et toujours illustrés par des exemples. Ceux qui ne l’étaient pas devraient sortir de cette lecture convaincus de l’intérêt d’un travail régulier sur la morphologie dès la classe de CP.
Lexique et compréhension des textes, Jacques Crinon (11 pages)
Enjeu : Développer des stratégies d’exploitation du vocabulaire et mettre en œuvre une régulation de la compréhension des écrits.
Les représentations courantes sur le rôle de la connaissance du vocabulaire dans les activités de lecture, de même que le rôle de celle-ci dans l’acquisition du vocabulaire doivent être nuancées. « Lire un texte aboutit à se construire une représentation mentale de la situation décrite par ce texte. » L’identification des mots est un passage obligé et doit être assez efficace pour permettre le traitement des mots à d’autres niveaux. Pour permettre la construction de la cohérence du texte, il faut des apprentissages stratégiques (recours au contexte, utilisation de la morphologie…). Par ailleurs, des recherches sur le développement du vocabulaire chez l’enfant montrent le rôle joué par les lectures. Mais leur effet est très inégalitaire, trop aléatoire pour qu’on puisse s’en contenter. Plusieurs propositions qui découlent des analyses précédentes sont donc faites « pourque les élèves, lorsqu’ils lisent des textes, ne soient pas arrêtés par leurs ignorances lexicales et pour favoriser le rôle de ces lecture dans le développement de leur vocabulaire. »
Intéressant à tous les niveaux d’enseignement, le texte se réfère constamment aux pratiques de classe courantes pour montrer lesquelles se justifient, lesquelles posent problème, et ceci de façon très clairement argumentée. Il donne à réfléchir à tous les enseignants, qu’ils aient déjà perçu ou non la complexité des processus de compréhension, et fournit de surcroit des pistes de travail concrètes et claires. La bibliographie comporte plusieurs titres en français.
L'acquisition du vocabulaire, Guy Denhière & Sandra Jhean-Larose(6 pages)
Enjeu : Traiter ici du vocabulaire, de son acquisition, de sa représentation en mémoire et de son rôle dans la compréhension et la production du langage, oral ou écrit. On y suppose une acquisition « normale » du langage, laquelle s’accompagne de variations considérables sous l’effet de facteurs bien répertoriés tels que le milieu social, économique, culturel des parents, l’habitat, etc.
« Par acquisition du vocabulaire, on entend la construction d’une représentation mentale stable formée d’un signifié et d’un signifiant (au moins un) associés de manière privilégiée avec des probabilités d’évocation de l’un par l’autre non nécessairement symétriques et univoques. » Les auteurs s’appuient sur la recherche de ces 20 dernières années pour contester la notion de « lexique mental », très représentée en France. Le vocabulaire s’acquiert en extrayant des invariants« par abstraction d’éléments communs à des occurrences (…) dans des situations et des contextes variés,» Les auteurs soulignent les limites du recours à l’image et à contrario l’importance des « activités de généralisation et de discrimination ». Ils concluent sur les moyens d’installer « l’envie d’apprendre » afin de lutter contre les inégalités.
Le texte intéressera des enseignants de tous niveaux, peut-être plus particulièrement dans les premiers cycles d’enseignement, dont les pratiques usuelles sont contestées de façon très solidement argumentée. Sa lecture nécessite cependant une certaine familiarité avec le vocabulaire linguistique.
La question du vocabulaire, dans une perspective littéraire, Francis Marcoin (3 pages)
Enjeu : En littérature, le vocabulaire s'entend bien plus dans l'usage que l'auteur fait des mots que dans leur nombre ou dans leur construction. S'interroger sur une approche du vocabulaire partant des textes, dans une perspective communicationnelle qu'il ne faut pas perdre du vue, sans s'interdire d'envisager également, mais dans un autre contexte et avec d'autres objectifs, la structuration des mots.
Au-delà des représentations sur le texte littéraire, « l’importance de mots courts et polysémiques » montre « que le sens se construit sans doute plus par la connotation que par la dénotation. » L’auteur souligne également le rôle du contexte et l’intérêt de la paraphrase, injustement décriée : « Comprendre, c’est donc redire avec d’autres mots. (…) En conclusion, pour le vocabulaire comme pour les autres composantes de la langue, la perspective communicationnelle semble essentielle même si la tentation est grande aujourd’hui de la remettre en question. »
Le texte apporte moins d’indication précise quant aux modalités du travail sur le texte littéraire que le texte de Crinon (supra).
Lexique et vocabulaire : quelques principes d'enseignement à l'école, Jacqueline Picoche. (4 pages) Enjeu :
Distinguer le vocabulaire du lexique de la langue. Proposer des principes d’action pour l’enseignement du vocabulaire.
Au-delà même des objectifs langagiers, « si l’on veut ouvrir les portes de la société française aux enfants de langue maternelle lointaine, la première urgence est de leur donner, par un vocabulaire bien maitrisé, le moyen de “penser français“ » L’auteur affirme qu’il « ne faut pas se laisser leurrer par des propos faciles », compter sur les hasards de l’imprégnation, mais que « les enfants sont capables d’abstraction bien plus qu’il ne nous semble ». Elle énonce et justifie « Quatre principes fondateurs pour développer le vocabulaire en classe. (…) 1. Partir du mot et non de la chose, 2. Partir du "déjà su", 3. Priorité au verbe et 4. Ne jamais séparer le vocabulaire de la grammaire. »
Ce texte est très clair et stimulant. Ceux qui souhaiteront mieux comprendre ses propositions peuvent se reporter au site de J. Picoche (voir plus bas), où ils trouveront des exemples très précis.
L'acquisition du vocabulaire en français langue seconde, Jean-Charles Rafoni (5 pages)
Enjeu : Développer le vocabulaire à l'école chez des enfants pour lesquels le français est à la fois langue seconde et langue de scolarisation est évidemment nécessaire, c'est également possible.
Malgré « l'impact du vocabulaire disponible », en particulier dans les tâches de lecture, l’auteur montre que les élèves allophones seront dans des situations très variables selon leur langue d’origine. Il plaide cependant pour des classes multilingues au sein desquelles les activités de chacun seront différenciées « selon le degré de familiarité qu'il entretient avec l'écrit scolaire. » L’auteur donne des pistes de travail appropriées, puis montre la richesse des apports langagiers possibles à l’école, « Les premiers champs lexicaux autour du "parler de l'école". Il insiste à l’aide d’exemples sur « Le rôle déterminant de la syntaxe pour l'acquisition du lexique ».
Ce texte est très clair et donne des perspectives encourageantes.
Sites de chercheurs
http://jpicochelinguistique.free.fr/ (consulté le 12/05/13)
Site des auteurs du Dictionnaire du français usuel (dorénavant DFU), Jacqueline Picoche et Bruno Germain.
o Le vocabulaire et son enseignement, présentation d’une expérimentation pilotée par Bruno Germain et Jacqueline Picoche et de ses quatre principes de base (voir plus haut).
o Un peu de théorie : 1. L'outillage lexical. Cet article publié dans Cahiers de Lexicologie, n° 78, 2001, Hommage à Robert Galisson, éditions Champion, présente les principes d’élaboration du DFU. 2. Le début de la collaboration avec les enseignants. 3. Dialogue autour de l'enseignement du vocabulaire (article publié dans Études de Linguistique Appliquée n° 116 - (1999) - pp. 421 à 434).
o La pratique en classe : cette partie renvoie au site http://www.vocanet.fr/ présentant des fiches pédagogiques par niveau de classe, de la grande section de maternelle à la cinquième.
Elles sont très éclairantes, même si elles n’entrent pas dans le détail de la séance, qui reste à construire.
http://leadserv.u-bourgogne.fr/bases/manulex/manulexbase/indexFR.htm (consulté le 13/05/13)
Site personnel de Bernard Lété, qui permet de télécharger sa « Base de Données Lexicales sur le Lexique Ecrit adressé à l'Enfant dans les Manuels Scolaires de Lecture ». Cette base de données très intéressante a été construite à partir du dépouillement de 54 manuels de lecture utilisés couramment à l’école primaire. L’étude porte sur trois niveaux : CP, CE1 et cycle 3.
Pour se repérer dans l’immense tableau qu’il propose, il est utile de se référer à l’article du même auteur paru à ce sujet, page 241 à 257 : Manulex : une base de données du lexique écrit adressé aux élèves, dans CALAQUE Elizabeth & DAVID Jacques (2004), Didactique du lexique : contextes, démarches, supports, De Boeck (Bruxelles, 272 p.)
Le livre est épuisé, mais peut être téléchargé en totalité ou partiellement sur le site
http://www.cairn.info/didactique-du-lexique--9782804146771.htm
[1]NB : les commentaires de l’auteur du présent article sont en italiques
[2] On note par exemple sous la plume d’A. Bentolila l’emploi de l’expression « dictionnaire mental », notion contestée plus loin par Guy Denhière & Sandra Jhean-Larose. Ces textes sont donc clairement indépendants les uns des autres.